C’est un thème des conférences qui ont meublé les quatrièmes journées scientifiques sur le VIH que le secrétariat permanent du conseil national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles a organisées les 11 et 12 juillet 2024. Prof. Didier Koumavi EKOUEVI de l’Université de Lomé est revenu sur les aspects clés de la lutte contre la TME de ces trois pathologies au Togo.

L’orateur a basé son intervention sur les données du programme national de lutte contre le sida PNLS Togo en 2022. Le Togo compterait, selon le professeur, 829 sites fonctionnels en PTME soit une couverture géographique de 84,3%. Dans ces centres, 4634 femmes enceintes séropositives ont été recensées et 3 602 seraient sous TARV (77,7%). En ce qui concerne les naissances de mères séropositives, 2 956 enfants vivants ont été recensés et 2 907 ont bénéficié d’une prophylaxie antirétrovirale (98,3% contre 96% en 2021).

En vue d’estimer les cas de séroconversion du VIH pendant la grossesse et identifier les femmes enceintes à haut risque de transmission du VIH à leurs enfants, une étude a eu lieu au Togo dénommée « epidemiological and virological surveillance of the prevention of mother-to-child transmission of HIV among pregnant women in Togo ». Selon professeur EKOUEVI, cette étude a permis de collecter au total 3148 échantillons de sang de cordon ombilical. 99,3% des femmes enceintes s’étaient présentées à au moins une consultation prénatale avant l’accouchement, et la séroprévalence étaient de 3,8% à Lomé. 85,9 % (104/121) étaient sous traitement ARV avant l’accouchement et on a enregistré une charge virale < 1000 copies/ml dans 97,5% (118/121) des cas.
La transmission mère-enfant du VIH bientôt éradiquée
Encore appelée transmission verticale, cette mode de transmission du vih survient au cours de trois étapes essentielles de l’enfant : au cours de la grossesse, au cours de l’accouchement et au cours de l’allaitement maternel. Cette voie de contamination est une des priorités de la lutte contre le VIH dont l’objectif en 2030 est zéro nouvelle infection chez les nourrissons et les jeunes enfants pour la stratégie mondiale du secteur de la santé de l’OMS et de la déclaration de la politique de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Au Togo,, l’objectif a été fixé à un taux ≤50 cas pour 100 000 naissances vivantes notamment <2% parmi la population sans allaitement maternel ou <5% parmi la population sous allaitement maternel. Selon Prof. EKOUEVI, tous les indicateurs sont globalement satisfaisants et il serait possible d’éliminer le VIH d’ici 2030 en améliorant le taux d’accouchement assisté car 92% de femmes VIH ont une charge virale supprimée à l’accouchement.
Prévention de la transmission verticale du VHB
Selon la stratégie mondiale du secteur de la santé sur l’hépatite virale 2016-2021, un appel a été lancé pour l’élimination de l’hépatite virale en tant que menace pour la santé publique d’ici à 2030 soit une réduction de 90 % de l’incidence, de 65 % de la mortalité et de moins de 0,1 % de prévalence AgHBs chez les enfants de 5 ans. Pour Prof. EKOUEVI, la prévalence du VHB chez les mères est de 10,6% selon une étude menée au Togo.
Sur 2105 paires mère-enfant, 35% des femmes ont subi un dépistage du VHB pendant la CPN, 85% des nourrissons ont reçu 3 doses d’immunisation contre le VHB. Parmi les mères ayant un HBsAg positif (n=223), 177 avaient une charge virale VHB détectable (> 10UI/mL), 3 nourrissons avaient également un HBsAg positif, soit une prévalence de 1,3%
Prévention de la transmission de la syphilis

2ème cause de mortinatalité dans le monde après le paludisme, la syphilis pendant la grossesse est responsable de prématurité, d’insuffisance pondérale à la naissance, de décès néonatal et d’infections chez les nouveau-nés. Prof. EKOUEVI a rassuré qu’il y a une faible circulation de l’infection par la syphilis parmi les populations clés au Togo. Au total, 2158 populations clés (678 HSH, 1003 FSW et 477 UD) ont été dépistés, la prévalence de la syphilis était de 0,6 % (IC 95 % = [0,3-1,0]) ; on ne note aucune relation entre le statut VIH et la syphilis (p = 0,236). Aucun cas de syphilis diagnostiqué chez les 298 personnes séropositives
Selon le rapport 2022 du PNLS sur la syphilis, l’orateur a poursuivi que le test HIV/Syphilis DUO été introduit sur 93 sites de PTME depuis 2018. Grace à ce test, on a pu dépister 103 721 chez les femmes enceintes. 1 276 étaient positives (1,2% contre 2,1% en 2020). 836 (65,5%) ont bénéficié de la Benzathine benzylpénicilline. 32 enfants nés des mères séropositives signe de syphilis congénitale contre 24 en 2020.
Le bémol
Le tableau de la lutte contre la TME VIH, syphilis et HB tend vers blanc au Togo en dépi de quelques défis. On note :
- Non disponibilité d’un test unique pour les 3 maladies
- Coûts annexes liés à la CPN
- Formation insuffisante des prestataires de soins
- Prise en compte non intégrée des 3 maladies
Approches de solutions
Les solutions proposées par l’orateur sont de plusieurs ordres. Il faudra développer la prévention primaire en mettant l’accent sur l’éducation et la sensibilisation des femmes en âge de procréer sur les modes de transmission du VIH, des hépatites et de la syphilis, ainsi que sur les moyens de prévention, sur l’accès aux préservatifs et sur la vaccination. Il propose aussi le dépistage prénatal systématique.